Une abbaye prestigieuse :
D'abord appelé Hubiliacum, puis Hubiliacus, le village prit au Xe siècle le nom de Saint-Marcel, évangélisateur du Chalonnais dont le martyre eut lieu en 177 après J.-C. à l'emplacement actuel de l'église. Au VIe siècle, le Roi de Bourgogne Gontran (petit-fils de Clovis) établit à cet endroit une abbaye richement dotée. Le prestige et le rayonnement de cette illustre abbaye du Haut Moyen-Âge furent exceptionnels, mais les Grandes Invasions n'épargnèrent pas Saint-Marcel au cours des siècles qui suivirent. L'abbaye, partiellement détruite, fit alors appel à l'Ordre de Cluny au Xe siècle.
Devenu prieuré clunisien, le monastère de Saint-Marcel, où Abélard mourut en 1142, conserva cependant son prestige et sa puissance. La dispersion des biens du clergé en 1789 n'entamera pas le sentiment d'unité que le rayonnement de l'abbaye de Saint-Marcel a suscité très tôt en soudant les communautés villageoises.
L'empreinte du maraîchage :
Le maraîchage, qui s'est développé à Saint-Marcel à partir de la fin du XIXe siècle, a marqué le paysage et les mentalités de la commune jusqu'à nos jours. Favorisée par des sols fertiles et la clémence du climat, la culture des légumes à Saint-Marcel a surtout bénéficié de la proximité d'un marché chalonnais en pleine expansion à l'époque de la Révolution Industrielle. Mais la production de Saint-Marcel, dynamisée par l'inventivité de maraîchers en avance sur leur époque, s'exporte bientôt de plus en plus loin.
Le maraîchage est à son apogée dans les années 1960, quand la puissante Union Maraîchère vend ses produits dans toute la France. Mais le vieillissement de la population agricole a ensuite entraîné le déclin de cette activité. Une production horticole de grande qualité (chrysanthèmes) l'a complétée à partir des années 1970, sans pouvoir enrayer la disparition progressive de l'agriculture à Saint-Marcel. L'urbanisme de la commune porte cependant encore les marques de cette tradition de cité-jardin que Saint-Marcel entend préserver malgré l'évolution de ses activités, désormais essentiellement liées aux services et à l'industrie.
Pierre Abélard et Héloïse :
Qui connaît aujourd'hui le philosophe Pierre Abélard ? Il existe à Saint-Marcel une rue Abélard, référence bien intellectuelle pour une commune industrieuse. Pourtant c'est ici qu'il y a plus de 800 ans, l'homme le plus lettré de son temps, l'esprit le plus vif de son époque, a fini ses jours. À la fin de sa vie, il est condamné par le pape pour ses idées trop novatrices ; il veut se rendre à Rome pour plaider sa cause directement auprès du pape. Mais il est épuisé, physiquement et moralement, par l'incompréhension dont il est victime depuis si longtemps. Sur la route de Rome, il s'arrête à Cluny. Pierre le Vénérable, prieur de l'abbaye et grand admirateur d'Abélard, lui offre alors l'hospitalité avant de l'envoyer se reposer à Saint-Marcel, où "l'air est bon et le climat doux".
Là, jusqu'au bout, il continuera à écrire, étudier et méditer. Il meurt en 1142 à l'âge de 63 ans, à sa table de travail, comme l'écrira Pierre le Vénérable à celle qui fut sa compagne, Héloïse, abbesse du Paraclet. Ce couple mythique, dont l'histoire a traversé les siècles, a eu un fils. Et l'on comprendra mieux leur indépendance d'esprit et leur curiosité scientifique quand on saura que celui-ci avait été prénommé "Astrolabe". Séparés dans la vie, Abélard et Héloïse ont été réunis dans la mort au cimetière du Père Lachaise. Et à leurs pieds, neuf siècles plus tard, on y trouve encore des roses fraîches...